Comment comprendre la soumission de l’épouse dans le Magistère ?

Dans l’encyclique “Casti Connubii”, le pape Pie XI ecrit ceci : “Cet ordre implique la primauté du mari sur sa femme et ses enfants, et la soumission empressée de la femme ainsi que son obéissance spontanée”. Cette affirmation est tempérée par d’autres établissant les devoirs du mari envers son épouse et l’amour qu’il lui doit. Cette vision du couple est évidemment conforme à certains enseignements de Saint Paul et elle est partagée par nombre de codes civils de l’époque. Mais elle est évidemment jugée profondément anachronique de nos jours et les papes suivants, Jean Paul II en particulier, se sont attachés à rétablir la dignité de la femme et l’égalité au sein du couple. Il n’empêche que cet enseignement de Pie XI apparait profondément contingent, lié aux conceptions temporaires d’une époque et de celles qui l’ont précédées. On pourrait citer de nombreux autres exemples. Comment distinguer, dans les enseignements du Magistère, ce qui est permanent et ce qui est dépendant des conceptions d’une époque, voué à disparaître.

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Evidemment, l’expression ne passe plus du tout de nos jours et peut certainement hérisser bien des personnes. Il y a en fait deux questions dans celle-ci. La première porte sur l’inculturation du Magistère à des circonstances nouvelles et la deuxième sur les relations d’autorité dans la famille.

1° Sur le premier point, plus général, c’est bien tout le problème et l’Enseignement de l’Eglise est interprété à chaque époque. Mais cela ne veut pas dire que toutes les évolutions sociétales doivent être approuvées. Prenons deux exemples : l’esclavage et l’avortement. Contrairement à ce que disent les cathophobes de tous poils, St Paul n’approuve pas du tout l’esclavage dans l’Epitre à Philémon. Il prend acte que l’esclavage existe et que tous les chrétiens n’affranchissent pas leurs esclaves. Il trace donc une ligne pour que chacun, maitre et esclave, adopte l’attitude la plus juste possible en rappelant l’égalité de dignité de chacun et la fraternité qui doit surpasser les relations de domination. Cela en attendant que le Magistère interdise l’esclavage entre chrétiens et que différents textes jusqu’au XVIIIe siècle rappellent ce principe. Principe que les esclavagistes, tous chrétiens qu’ils étaient, ont négligé, ce que, encore une fois, les anticléricaux évitent soigneusement de rappeler. Une fois l’esclavage aboli dans les pays de tradition chrétienne, il n’y a plus lieu de s’en préoccuper et différents mouvements d’Eglise s’engagent pour le faire disparaitre là où il reste un fléau (on sait bien que l’esclavage existe toujours ailleurs et/ou prend d’autres formes). Cela ne rend pas l’Epitre à Philémon caduque pour autant.

A l’inverse, la dignité de la personne humaine depuis sa conception est une constante du Magistère depuis au moins le IIe siècle, à quelques nuances près. Le refus de l’avortement n’est donc pas contingent.

2° Sur l’exemple spécifique des relations entre mari et femme, on peut s’interroger de différentes façons. Dans une vie de famille harmonieuse, les décisions se prennent en accord entre les époux, et même dans certains cas avec les enfants. Pourtant, si les deux époux ne parviennent pas à un accord et qu’une décision doit être prise, que faire ? A un moment, quelqu’un doit trancher. Il est tout à fait possible que ce soit la femme, et c’est souvent le cas quand il y a des enfants. Mais que se passe-t-il dans les couples et la femme « porte la culotte » constamment ? Sont-ils durables ?

Bien sûr, rien ne doit donner l’impression d’encourager une quelconque domination violente de l’homme dans une famille et trop d’agressions doivent être combattues vigoureusement. Mais les femmes savent bien que ce sont le plus souvent elles qui sont les garantes d’un mariage, l’homme est trop souvent soumis à bien des forces centrifuges qui rendent ce rôle de pilier plus difficile pour lui. Si le mari est privé de responsabilités, s’il ne se sent pas investi dans son rôle de chef de famille, que se passera-t-il ? Que se passe-t-il, d’ailleurs dans près d’un couple sur deux ? La communication et la prise en compte des besoins de chacun n’est-elle pas une clef ?

Deux exemples d’Italie permettent de l’illustrer. Le premier est un film de 2024 décrivant une femme aux prises avec son mari violent dans une société encore très machiste, Il reste encore demain. Son succès montre qu’il fait mouche. L’autre, datant de 2012 est un diptyque de Constanza Miriano, Marie-toi et sois soumise et Epouse-là et meurs pour elle. Ces livres ont déclenché un véritable scandale en Italie et ont été, en même temps, de phénoménaux succès de librairie. Preuve qu’on peut revisiter St Paul sur ce sujet de nos jours et que c’est peut-être ainsi qu’il faut réinterpréter Casti Connubii.

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