
L’enseignement des Pères, les Conciles, etc. appartiennent au magistère de l’Eglise. Mais les disputes non : va-t-on requestionner la double nature du Christ sous prétexte que cela ait fait débat dans l’antiquité, ou que certaines dénominations chrétiennes participants aux rencontres œcuméniques tiennent encore ces positions ?
Fidèle à notre habitude de répondre aux questions dans les commentaires, nous avons extrait cette question-ci d’un commentaire sur le port du voile des femmes à la messe (cf. https://reponses-catholiques.com/mantille-ou-plutot-voile-6/). Bien sûr, nous voyons encore moins le rapport entre la double nature du Christ et le fait de ne pas porter un voile ou une mantille, qu’entre le fait de se promener en sous-vêtement et celui d’être tête nue à la messe. Mais sur le plan de la théologie dogmatique et de l’étude des sources de la foi, il y a beaucoup à dire sur cette question-ci.
1° Premièrement, la disputatio est le cœur de la théologie. Donc, au contraire, les disputes entre Pères de l’Eglise sont très importantes. Certaines sont tranchées dans le Magistère, par exemple lors d’un Concile (ce qui nous amène à la question de la double nature du Christ ci-après), d’autres ne le sont pas de façon univoque et c’est clairement le cas pour le port du voile, ainsi que nous l’avons longuement montré. C’est bien pour cela que le droit canon n’en fait pas une obligation, ni une interdiction non plus. De même, il n’y a pas qu’une seule interprétation de l’Ecriture. Depuis St Augustin, on sait qu’il y en a au moins quatre : littéral, allégorique, éthique et anagogique. Certaines ne sont pas autorisées par l’Eglise. Mais ce qui n’est pas interdit est autorisé. Donc l’interprétation de 1 Corinthien à propos du voile des femmes n’est pas univoque. Et, évidemment, une bonne interprétation ne peut se passer de l’analyse du texte dans sa langue d’origine. C’est faire injure à tous les exégètes depuis St Jérôme que de prétendre que c’est sans intérêt.
2° Pour ce qui est de la double nature du Christ, elle est tranchée au Concile de Chalcédoine (451). Le concile répondait à deux hérésies symétriques. La première est de dire que le Christ n’est qu’un homme. Il existe peut-être des églises chrétiennes à la marge du protestantisme affirmant cela (car on trouve tout et son contraire dans le protestantisme) mais nous n’en connaissons pas. Au contraire, ce qui fait que les églises chrétiennes reconnaissent mutuellement leurs baptêmes respectifs, c’est que ces baptêmes sont trinitaires, donc présupposant la divinité du Fils et de l’Esprit. C’est pour cela que les Mormons ou les Témoins de Jéhovah ne sont pas considérés comme chrétiens : ils n’ont pas de baptême trinitaire.
Donc le dialogue oecuménique ne remet en rien en cause la nature divine du Christ, puisque les chrétiens sont d’accord là-dessus.
Venons-en à l’hérésie inverse, la négation de la nature humaine du Christ. Comme nous l’avons rappelé récemment dans https://reponses-catholiques.com/pourquoi-leglise-catholique-est-la-seule-depositaire-de-la-vraie-foi/, les tenants de cette thèse, monophysites et nestoriens, entre autres, ont admis une formulation dogmatique qui rend leur foi compatible avec celle des catholiques et orthodoxes. C’est bien grâce au dialogue œcuménique qu’on a pu avancer sur ce point.
Par conséquent, le dialogue œcuménique n’amène en rien à « requestionner » la double nature du Christ. Au contraire, il la conforte.
3° Ceci dit, le dialogue œcuménique est, par définition, l’échange avec des groupes chrétiens schismatiques ou hérétiques, pour tenter de rapprocher les points de vue. Avec certains succès comme dans le cas de la double nature du Christ, comme on vient de le voir, ou de la doctrine de la Prédestination, sérieusement amendée dans un sens compatible avec le catholicisme par plusieurs églises luthériennes. Mais, par définition, cela amène à discuter avec des gens qui ont des divergences dogmatiques, parfois graves, avec le catholicisme. Si tout le monde était d’accord, il n’y en aurait pas besoin.
Mais, encore une fois, quel rapport avec le voile ? Ce n’est en rien un point du dogme. Que nos lectrices ne se laissent pas intimider : ni l’Ecriture, ni la Tradition, ni le droit canon ne les obligent à en porter. Pas plus qu’elles ne doivent se laisser impressionner par des discours pseudo-religieux qui prétendraient leur interdire de se mettre en pantalon.