La lecture du livre “L’Affaire” de Tangui Cavalin m’amène à poser cette question : à partir de quel seuil la recherche théologique devient-elle de la gnose ?
Nous n’avons pas lu le livre mais cette question de la gnose est en effet, très importante. C’est la première hérésie dont on trouve déjà la trace dans la Première épître de Jean, à la fin du Ier siècle.
La gnose n’est pas une question de seuil. Ce n’est pas en termes de degrés qu’elle se différencie de la théologie catholique mais de nature. Gnosis, en grec, signifie, « connaissance ». La gnose prétend que le salut s’acquiert grâce à une connaissance des vérités de foi, mais de façon cachée. Elle n’est accessible qu’à la suite d’une initiation, à un petit nombre de fidèles initiés.
La plupart des mouvements gnostiques différencient le Dieu tel que révélé dans la Bible avec un autre dieu, qui est le seul véritable. Souvent, ils s’appuient sur la distinction entre le Dieu de l’Ancien Testament, qui ne serait pas le vrai ou serait un dieu inférieur, et le Dieu des Evangiles, qui lui, serait le bon… Encore que véritablement révélé ailleurs que dans la Bible canonique.
Leur doctrine est souvent dualiste, séparant ce qui relève du corps, mauvais, du spirituel, qui lui, serait bon et conforme au véritable dieu. Il en découle parfois le paradoxe que, puisque le corps n’a aucune valeur, les péchés corporels n’ont aucune incidence sur les authentiques spirituels que les gnostiques pensent être… Et que tous les excès sexuels sont permis car n’ayant aucune consistance.
Une autre caractéristique des gnostiques, c’est leur séparation du catholicisme, même si c’est parfois de façon clandestine : ils peuvent se prétendre catholiques et aller à la messe, tout en ayant d’autres rites secrets ailleurs.
En résumé : doctrine cachée au plus grand nombre, et en général le plus grand nombre catholique, révélations hors de la Bible, connaissance réservée à une élite initiée, culte du secret, autre dieu et personnes de foi (la Vierge Marie, Marie-Madeleine, par exemple) déformées par rapport à ce que la foi catholique en dit, sexualité déviante. Rien à voir avec la recherche théologique catholique là-dedans.
On ne peut répondre à ce genre de question car le mot “gnose” recouvre des réalités différentes voire contradictoires. St Irénée polémiquait contre des gnostiques qui n’avaient pas grand chose à voir avec Clément d’Alexandrie et d’autre Pères de l’Eglise que se proclamaient “gnostiques”.
Si on réduit le concept au salut donné par une Révélation, alors l’Eglise est profondément gnostique ( cf l’Angélus “afin qu’ayant connu l’incarnation du Christ votre Fils…”).
L’Evangile (en particulier chez Saint Jean) témoigne de cette connaissance révélée ; la Foi est un don de la Grâce et pas un mérite…
Que sous le mot de gnose de multiples hérésies se sont manifestées, c’est évident mais ne jetez pas le bébé avec l’eau du bain.
Pour aller plus loin: cf Jean BORELLA PROBLÈMES DE GNOSE
Collection : Théôria L’Harmattan